L’idée de ce « Modern INDIAN RESERVATION BLUES
and more… » s’est imposée d’elle-même ces 2 dernières années. Elle est
parti de la rencontre avec Pura Fe’, artiste de la tribu amérindienne
Tuscarora, dont les deux premiers albums, mix de folk-blues et de
protest songs largement influencés par la musique des tribus du
Sud-Est, ont été très bien accueillis en France.
Pura Fe’ a mis
en relation Guy l’Américain (qui fait le talent scout pour DIXIEFROG
depuis maintenant dix années) avec divers artistes amérindiens
d’horizons musicaux très divers. Jean-Pierre Bruneau, journaliste
curieux et vidéaste de profession, s’est joint à l’équipe pour
envisager un projet visuel (DVD ou « galop d’essai » pour intéresser
une chaîne de télévision sur le sujet).
Voici donc il y a deux
ans Guy l’Américain en route pour l’un de ses voyages habituels et
bi-annuels aux Etats-Unis, mais équipé par ses camarades, cette
fois-ci, d’une caméra amateur.
Deux mois plus tard il est de
retour avec (environ) trente heures d’images, des moments très
émouvants, de la musique et des entretiens comme l’on peut en obtenir
quand il n’y a pas d’équipe professionnelle de TV et que celui avec
lequel on parle oublie la toute petite caméra qui va fixer le moment
particulier que l’on ne retrouvera peut-être jamais.
Tous les
artistes amérindiens qu’il rencontre là-bas, aux USA et au Canada, sont
généralement peu structurés professionnellement et certains vivent
toujours, du moins à temps partiel, dans des réserves. Ils lui donnent
des CDs, souvent distribués de façon artisanale, ou de simples CDRs,
qui seront écoutés religieusement dans l’hexagone comme ils le méritent.
Tous
ces enregistrements sont de nature très diverses, il y a du blues, de
la country, du rock, des chants tribaux bien entendu, mais aussi du
hip-hop et du R & B. Mais toute cette musique est reliée par un fil
rouge. Tout d’abord musicalement : quand ce ne sont pas carrément des
chants « ethniques » qui se mêlent au blues ou au rap, on sens toujours
dans la mélodie ou l’interprétation « l’âme indienne », lancinante et
guerrière toute à la fois, empreinte de dignité et de souffrance comme
les premiers blues noirs-américains. Et puis, aussi, il y a ces mots
qui reviennent toujours, titres après titres : Reservation, Ancestors,
Mother earth, Brothers & Sisters, Genocide.
Loin de nous
l’idée de politiser le débat, la France n’a pas de leçon à donner aux
autres, et les amérindiens, sans doute, ne sont pas parfaits. Il y a
les dignes fils de Geronimo et les nouveaux businessmen des casinos.
Mais si il y a un parfum de mélancolie, de colère et de révolte chez
beaucoup de ces artistes (donc beaucoup, certainement, se considèrent
malgré tout comme américains), on est frappé, à l’écoute de leur
musique, par la dignité et même la spiritualité de ces créateurs.
L’esprit
des ancêtres souffle toujours dans les paysages grandioses, le guerrier
est toujours là (« We’re fighting terrorism since 1492 ») ainsi que le
message d’union avec la nature, le sentiment qu’il faut respecter la
terre nourricière qui est là pour tous les êtres vivants et la
certitude que personne ne peut posséder ou s’approprier "mother earth"
ou "father sky ». Tout cela est très présent dans leur culture ainsi
que l’idée que l’homme, bien que considéré comme la dernière création
n’est qu’une petite partie d’un grand tout bien au-delà de la
compréhension intellectuelle. Ce message est frère du message
écologiste et bouddhique, il pourrait bien être utile à notre planète
aujourd’hui.
Enfin, ce qui est remarquable et qu’il faut
souligner, c’est que si la musique amérindienne évoque dans l’esprit de
beaucoup l’image d’indiens emplumés qui jouent de la flûte et des
tambours, la vérité est bien différente. Il est temps maintenant de
découvrir les indiens rebelles du hip-hop, les générations récentes de
« native americans » imprégnés de blues, de rock et de country music,
et de comprendre enfin l’influence non négligeable (et méconnue) de la
musique amérindienne sur la musique « roots » américaine.
Il y a donc encore quelque chose à découvrir musicalement en provenance des Etats-Unis ? !
Certes
oui, et il y a aussi là une mine d’or pour celui qui s’intéresse à
l’aspect social, politique et géographique de l’Amérique et du Canada.
Il y a, enfin, une pensée philosophique et spirituelle qui ne peut
aujourd’hui qu’apporter un souffle rédempteur au monde et surtout à
l’Amérique, fer de lance avancé de l’Occident (jusqu’à la dernière
élection présidentielle…) en ce qui concerne la surconsommation et de
la pollution.
Ce « Modern INDIAN RESERVATION BLUES and more… »
sera présente sous forme d’un triple album. Chacun des trois CDs
proposera environ une heure de musique et 10 minutes de vidéo. 33
artistes sont regroupés sur la partie purement sonore et la moitié
apparaîtront sur le document filmé. L’album comportera un livret de 48
pages afin de mieux faire découvrir la personnalité et les origines de
ces interprètes.
Il est également prévu un « road movie » de 52
minutes dans les mois à venir ainsi qu’une tournée qui amènera sur les
routes d’Europe plusieurs des artistes de cet album concept.
C'est ce que je suis en train d'écouter et c'est franchement magnifique .