Une autre review d’un petit jeune de 27 ans belle prose.
Je ne suis pas revenu sur le forum depuis le concert de Marseille, je vous en donne donc mes impressions sans lire aucun commentaire, sans risque de me faire influencer de quelque manière que ce soit.
Pour remettre rapidement les choses dans leur contexte, j'ai assisté au concert en compagnie de mon père. Nous étions placés dans le pit A, contre la barrière mais assez excentrés sur la gauche, juste devant René, le fameux supporter folklorique de l'OM.
Par bonheur, la chaleur n'était pas écrasante à Marseille de sorte que nous avons pu arriver à notre poste relativement frais. Un groupe de jeune Canadiens, les Glorious sons, a assuré une première partie tout à fait respectable, leur chanteur n'étant pas dénué d'un certain charisme scénique. Il nous a fallu ensuite attendre jusqu'à presque 22 heures pour voir nos chers Stones, ce qui n'était pas plus mal comme ça le concert s'est déroulé presque intégralement de nuit.
Le show commence avec Street fighting man. L'interprétation m'a parue plutôt bonne sans être vraiment marquante. En revanche, je pense qu'une chanson plus connue parlerait davantage au public, surtout francophone, en guise d'entrée en matière. Je lui donnerais la note de 5/10.
S'enchaînent ensuite It's only rock'n roll et Tumbling dice, deux chansons que les spectateurs avertis voudraient souvent voir laisser leur place à des titres moins remâchés. Personnellement, j'éprouvais totalement ce sentiment avec It's only rock'n roll, que j'ai toujours trouvée largement sur-estimée, mais pas du tout pour Tumbling dice qui est un de mes morceaux favoris du groupe, n'en déplaise à Jaggered.
La suite de mon propos va cependant lui donner raison. Autant It's only rock'n roll fut plutôt une bonne surprise, je me suis laissé prendre au jeu. Autant Tumbling dice m'est apparue poussive et bâclée, sa bien-aimée coda apparentant davantage à une lente agonie qu'au feu d'artifice ronflant que je ne veux jamais voir se terminer.
Résultat, 6/10 pour It's only rock'n roll et 4/10 pour Tumbling dice.
Nous arrivons maintenant au passage du concert réservé aux morceaux plus rares. Le premier met à l'honneur le dernier album : Just your fool. C'est bien sûr une chanson de plus modeste envergure mais elle est interprétée avec conviction et énergie, Mick se montrant inspiré à l'harmonica. Le résultat est agréable à vivre et mérite un 6/10.
Le public avait le choix entre Rocks off, All down the line, She's so cold et Get off of my cloud. Sur le moment, je fus déçu qu'il privilégie cette dernière car c'était celle qui m'emballait le moins. Néanmoins, j'ai vite oublié cela pour apprécier une belle version où le public s'est pour la première fois de la soirée montré réceptif, pointant rageusement Mick du doigt à chaque "Hey you !" Cela vaut bien un 7/10.
La ballade de la soirée ne fut autre que Fool to cry. Difficile de me prononcer sur cette prestation où je me suis vite ennuyé et en ai profité pour me consacrer à le prise de photos. A la louche, je mets donc 5/10.
Les poids lourds reprennent du service avec You can't always get what you want. Plus de chorale pour ce titre maintenant, ce qui est peut-être logique au vu de son replacement en première partie de concert. L'interprétation a été plutôt laborieuse, la faute notamment à un public marseillais très peu bruyant qui rechignait à prendre le relais de Mick sur le refrain. Malgré ces réserves, je ne peux tout de même pas descendre en dessous de 6/10.
Ensuite, Paint it black constitue ma deuxième déception de la soirée sur un de mes titres de prédilection après Tumbling dice. Le résultat est moins poussif mais assez monocorde, aucun instrument n'arrivant à se détacher : 5/10.
Le tir est bien corrigé par Honk tonk women, où, à l'inverse, chacun remplit sa fonction avec précision pour livrer une prestation emballante qui vaut facilement un 7/10.
Le milieu de show est synonyme du moment Keith. Comme à son habitude, il alterne une ballade et un rock, en l'occurrence You got the silver et Before they make me run. La première repose en grande partie sur son entente avec Ron. Les deux compères nous proposent un agréable numéro de duettistes, ils peinent un peu à maîtriser leur guitare acoustique mais tout cela reste dans les limites du raisonnable.
C'est beaucoup moins le cas sur Before they make me run. Keith paraît un peu perdu au début de la chanson et se plante assez fortement. La suite est un peu meilleure mais je doute quand même que ce morceau, que j'aime bien sur l'album, soit vraiment adapté à la scène.
J'attribuerais donc 5/10 à You got the silver et 4/10 à Before they make me run.
Mick reprend son poste avec Sympathy for the devil. L'introduction est excitante durant les chœurs et l'entrée de Mick. En revanche, les guitares viennent quelques peu gâcher cette harmonie. Leur volume est trop fort et couvre complètement le chant. Leurs interventions semblent donc complètement saccader le morceau. Reste une belle sensation du public qui se laisse gagner par l'ambiance générale du morceau : 6/10.
Les spectateurs qui commencent doucement à se prendre au jeu vivent sûrement leur participation la plus active sur la chanson suivante : Miss you. Toutes les bases de ce succès sont bien respectées puis le titre joue les prolongations avec une basse et un saxophone bienvenus. Keith semble se désintéresser de la scène mais le reste du groupe est très enthousiaste et desserre le frein à main qui les bride parfois. Ce moment a été pour moi le meilleur de la soirée et justifie un 8/10.
Je sais, ce genre de commentaire est loin d'être unanimement partagé mais je suis moins convaincu par Midnight rambler, surtout dans cette version de Marseille où Mick semblait un peu patauger à l'harmonica. Ce long titre peu structuré nécessite selon moi une vraie adhésion du public pour devenir excitant. Or, ça n'a pas du tout été le cas. Les "Oh yeah !" de Mick ne trouvaient quasiment aucun écho de sorte que la longueur de la prestation en devenait plus une faiblesse qu'un atout. Heureusement, la dernière minute, plus dynamique et montrant un Mick déchaîné dans ses mouvements, permet de finir sur une bonne note et d'accrocher un 6/10.
La cadence du concert s'accélère en enchaînant trois rocks à riffs : Start me up, Jumping Jack flash et Brown sugar. Start me up, que je considère habituellement comme un peu en-dessous des deux autres, est paradoxalement celui qui m'a le plus emballé. Keith a bien réussi, un fois n'est pas coutume, son riff initial et Mick a ensuite tenu l'auditoire en haleine sans faiblir. C'était une rupture de rythme bienvenue après trois longs titres à la suite : 7/10.
Jumping Jack flash s'est révélée un peu plus brouillonne. Les chœurs avaient du mal à se faire entendre sur le refrain, comme assez souvent dans la soirée d'ailleurs. Les guitares paraissaient plus éteintes, tout comme Mick qui perdait quelque peu son souffle. Bref, une version faiblarde loin de rester dans les annales : 5/10.
Brown sugar, lancée par Keith alors que Mick était en plein laïus au public, s'est déroulée assez fadement jusqu'à sa coda. Celle-ci avait trouvée un bon rythme, entre groove et dynamisme, dommage que le public n'ait pas répondu plus franchement aux "wooo !" réclamés par Mick. Je situerais cette prestation à 6/10.
Après un bref intermède, durant lequel certains spectateurs ont tout de même cru bon de sortir du stade, le rappel commence par Gimme shelter. Le titre fut bien mené, que ce soit au niveau des guitares, du chant et des chœurs. Le seul point faible est selon moi le passage central interprété par Sascha Allen, qu'on est bien loin du niveau de Lisa ! Néanmoins, elle se rattrape en ajoutant des "woo-oo-oo" en fin de morceau que ne faisaient pas sa prédécesseur et qui se révèlent fort à propos. Un grand titre ainsi qu'une bonne version, ça vaut 8/10 selon moi.
Le final sur Satisfaction n'était pas catastrophique mais aurait pu être plus enthousiasmant, la faute à son légendaire riff de guitare trop discret à mon goût. A noter que le micro de Mick ne fonctionnait plus en fin de chanson, ce qui ne l'a pas dissuader de vociférer dedans avec conviction jusqu'au bout. Pour cette clôture, un moyen 6/10.
Pour prendre un peu de recul, je dirais que le concert m'a globalement plu, il était même un peu meilleur que ce que je pensais au vu de toutes les critiques acerbes qu'on a pu lire ces dernières semaines. Le principal motif de satisfaction est que, hormis peut-être sur Tumbling dice et Jumping Jack flash, je n'ai pas eu la sensation d'un groupe mou qui jouait sur des tempos ralentis.
Mick était, comme très souvent, en grande forme. Il virevoltait au rythme de la musique sans faiblir pendant deux heures. Impossible de croire qu'il a 75 ans pour quelqu'un qui ne le saurait pas. Ses interventions entre les chansons, bien dosées et parfois drôles, permettent de pas s'ennuyer une minute durant le show.
Keith paraît par contraste beaucoup plus éteint. Même pendant ses prestations au chant, il ne semble pas vraiment concerné. J'ai du mal à le voir prendre un vrai plaisir sur scène, si ce n'est durant quelques moments de complicité avec Ron.
Ce dernier à l'inverse est heureux comme un gamin. Il donne l'impression de découvrir la scène comme un nouveau jouet. Il sautille, rit à la moindre occasion et regarde régulièrement le public dans les yeux, ce qu'il est le seul à faire avec Bernard Fowler. Bien sûr, son jeu est un peu fouillis mais il compense par cette bonne humeur constante.
Enfin Charlie est fidèle à ce qu'il a toujours été : appliqué et stoïque. J'ai l'impression qu'il se passerait volontiers de ces tournées à son âge mais qu'il ne veut pas être celui qui signe la fin du groupe.
Bref, un concert qui remplit très bien sa mission pour le grand public. Ils ont pu profiter d'un spectacle bien rodé et distrayant, écouter toutes les chansons majeures du groupe et ne pas être trop heurté par les approximations musicales.
Les spectateurs assidus y trouvent sûrement moins leur compte, préféreraient une enceinte plus intimiste, des chansons moins rebattues et un jeu plus propre.
Personnellement, je me situe un peu entre les deux. Un concert en petite salle me ravirait complètement, et je pense que c'est par là que le groupe doit passer pour éviter de tourner en rond. Quand je découvre les setlists depuis mon salon, je voudrais être davantage surpris mais, une fois au stade, je suis content de pouvoir chanter les grands titres en chœur. Enfin, la prestation musicale m'est apparue tout à fait présentable pour des gaillards de cet âge, je n'en demande pas plus.
Nombreux sont ceux qui disent que lorsqu'on a entendu les concerts des années 1970, il est difficile de se satisfaire de ce qu'ils proposent aujourd'hui. Je pense qu'au contraire, si on avait dit aux spectateurs de l'époque que les Stones proposeraient encore un spectacle comme celui de Marseille quarante ans plus tard, ils auraient été épatés et fiers.